Habitat-thérapie : la Sécurité
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Un de nos besoins primaires est la sécurité. Lorsque nous sommes en sécurité nous pouvons faire des activités qui ne demandent pas trop de vigilance : lire, rêver, se relaxer, regarder un film, etc. sans devoir faire attention à notre environnement. Anne Poussielgues raconte que sa chambre « devient le lieu de tous les voyages :
voyage intérieur, sentimental, sensuel […] mais aussi pour écrire, travailler,
recevoir. On peut y réfléchir allongé, suffisamment abrité pour que
l’imaginaire se libère ».
Notre logement doit, normalement, nous apporter cette sécurité qui est à la fois un besoin de protection physique et psychique. Il nous procure un alentour stable et prévisible.
Cette première fonction pose
que le premier apport d’un habitat est de procurer à ses usagers de la
sécurité. « Tout ce que je demande,
c’est un coin à moi, à l’abri du froid et de la nuit »[1]
[24, p.58]. L’habitation répond à la fois au besoin de protection physique et
au besoin d'environnement stable et prévisible. Les animaux partagent ce
besoin d’abri vis-à-vis des aléas de l’environnement et des risques de
rencontrer des prédateurs, « l’habitation
[…] est le fait technique le plus commun aux hommes et aux animaux » [47,
p.243].
L’idée de la contribution de
l’habitation à la protection de la personne revient dans la plupart des écrits
sur le lien entre logement et
psychologie. Pour Fischer [27, p.147], « tout logement est d’abord un abri à l’intérieur duquel l’individu se
sent protégé ; en ce sens l’habitat représenterait une sorte de barrière
face aux intrusions externes. » Cova [14, p.7] indique que « le
« chez soi » porte ainsi en lui une valeur de protection. A l’abri des
agressivités extérieures, cet espace s’apparente au nid, comme valeur de
refuge, de repos, ou de tranquillité. Il protège de l’hostilité du monde extérieur. »
Les auteurs d’autobiographies
qui évoquent de la manière la plus prégnante la sécurité dans leur rapport à l’habitat,
sont ceux qui ont souffert de manquer d’un chez soi ou d’être empêchés de vivre
dans celui-ci.
Le premier moyen nécessaire
au sentiment de sécurité et donc à l’investissement dans cette fonction est la solidité de cet abri que constitue
l’habitat. L’épaisseur des murs peut participer à ce ressenti, c’est ce que
l’architecte Mario Botta exprime par l’empâtement emphatique des parois. La
visibilité des structures peut avoir ce même effet sur notre inconscient, ce
dont jouent les modénatures classiques qui mettent en valeur les poteaux et
poutres du bâtiment. À l’inverse, le sentiment de fragilité des parois est
particulièrement néfaste.
Le deuxième moyen nécessaire
à la sensation de sécurité est la
maîtrise de l’intrusion. Une manière de dissuader l’intrusion est de rendre
son espace difficile d’accès, ainsi les enfants aiment à se créer un repaire
dans un arbre, comme Brasse - Bouillon dans le taxaudier [5, p.228]. Les anciennes
maisons urbaines du Sud-est français et de Corse, présentent un escalier très
raide pour accès. Le succès en occident des « résidences fermées » [49] témoigne également de cette
tendance. La maîtrise de l’intrusion peut également être facilitée par la perception anticipée de l’approche d’un
danger, l’occupant est en position de guetteur d’un éventuel intrus. Les architectes remarquent dans leurs pratiques des
demandes fréquentes de pouvoir observer ce qui se passe dans la rue depuis une
fenêtre. La possession d’un chien, joue un double rôle d’avertisseur et de
défense de l’intrusion. L’installation préférée dos à la paroi, assure cette
perception anticipée.
Dans un pays où celle-ci est
garantie par les pouvoirs publics, la
propriété de son habitation constitue un troisième facteur de sécurité. Au
fil du temps, Kauffmann [43, p.237] acquiert de plus en plus de terrains autour
de sa maison, « vous savez bien que
c’est pour me protéger » dit-il au notaire. Malavoy [50, p.182] se
rend compte de la satisfaction de son père lorsqu’il se trouve en mesure
d’acquérir une maison, malgré son métier de saltimbanque.
La sécurité peut
malheureusement être mise à mal à l’intérieur même de l’habitat. « Mme O. dormait dans le salon et au-dessus de
son lit, était suspendu comme une épée de Damoclès, cet appareil énorme. […] qui
prenait l’espace physique et affectif de la famille. » [52, p.218] « C’était ma chambre mais ça n’était pas protégé. N’importe qui pouvait y
entrer à tout moment. […] C’était un coin à moi mais fragile. » [52, p.218-219].
La sécurité est donc un besoin primaire que nous partageons
avec un certain nombre d’animaux. Notre habitat est une des réponses à ce
besoin de protection vis-à-vis de notre environnement physique et humain.
Très pertinent, comme toujours.
RépondreSupprimerLes exemples sont bien choisis et ne demandent pas d'explications supplémentaires.
Peut-être aurait-on envie d'en savoir plus sur la forme de l'habitat et la sensation de sécurité (yourte, roulotte), ainsi que sur le contexte social (habitat isolé, appartement, hameau...)
Mais un tel sujet ne peut qu'être effleuré en quelques paragraphes, et cet article nous amène à réfléchir à nos propres stratégies en matière d'habitat et de sécurité, ce qui est toujours instructif !